Tu es partie




Sous les frappes d'une salve humide tu es partie
Sans cuirasse ni camail ni gorgerin
Ne portant que le sac de ton chagrin
Sous les derniers soubresauts d'un regard anéanti

Dégoûtée des ruines de ce champ de bataille 
Où toute victoire orpheline est une défaite
Où la jalousie souriante fait seule la fête 
Quand l'amour s'avère n'être qu'un bail

Tu marchais dans la nuit des fantômes
Entourée des démons fous qui se déchaînent
De l'alcôve sale d'un passé fontaine
Qui rejaillit par tes souvenirs de môme

Tu emportais avec toi mon point de faiblesse
Ces talons délicats qui firent autrefois tomber Achille
Que le sang de mon coeur submergeait comme le Nil
Pour rendre invincible ta grande prouesse 

Tu t'éloignais et avec toi s'éloignait l'espoir
Que demain sera peut- être meilleur
Que les graines de notre amour seront des fleurs
Que je pourrai enfin me voir

Engloutie par le manteau de la nuit
Qui t'enlaçait maintenant à ma place
Effaçant de mes bras toute trace
Autour de ton grand corps affaibli 
  
Aucune fois tu ne t'es retournée
Ne serait- ce que pour me maudire
Pour me regarder ou pour me dire
Une dernière fois que tu retournais

Seul devant l'immensité du vide
Mes yeux se coursaient pour aller loin 
Pour essayer de te dénicher après le coin
Derrière lequel disparut ton égide.

Sagi SINNO, Le jardin d'ecchymoses, II- Éclaircies.

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